Publié le 01 déc 2008Lecture 8 min
AVC du sujet âgé : quelles mesures thérapeutiques ?
Y. BÉJOT, O. ROUAUD, M. CAILLIER, I. BENATRU, G.-V. OSSEBY, P. PFITZENMEYER, M. GIROUD, CHU de Dijon
Les AVC du sujet âgé ne doivent plus être traités de façon inadaptée comme par le passé et tout médecin doit appliquer un certain nombre de mesures pour éviter toute perte de chance. Aussi, la prise en charge en phase aiguë devrait-elle bénéficier d’une surveillance intense capable de diminuer la mortalité et le taux de handicap, que seule une unité neurovasculaire peut apporter.
Quel que soit l’âge, l’AVC est une urgence médicale comme l’a souligné la circulaire ministérielle n°517 du 3 novembre 2003, s’appuyant sur le progrès médical majeur que représente la prise en charge immédiate des AVC dans une unité neurovasculaire (UNV) (1-3) et le traitement de l’infarctus cérébral par la fibrinolyse (1,3,4,5). L’application de ces mesures médicales n’est possible et efficace que si une imagerie cérébrale est effectuée en urgence pour différencier l’infarctus cérébral (90 % des cas) de l’hémorragie cérébrale (10 % des cas), dont les traitements sont radicalement opposés. Chez le sujet âgé, il est démontré que la prise en charge coordonnée des AVC chez le sujet âgé améliore le pronostic et en diminue le coût (2). Traiter une urgence vitale immédiate C’est avant tout le traitement symptomatique d’un oedème aigu du poumon, d’une insuffisance ventriculaire gauche, d’une inhalation, ainsi que la prise en charge d’un coma en détectant les facteurs métaboliques éventuellement contributifs. La dissection de l’aorte est une grande urgence qu’il faut penser à repérer. Contrôler les paramètres physiologiques délétères sur le neurone ischémie Hypoxie On la traite par O2 (3 l/min) ou une ventilation assistée, si nécessaire. Hyperglycémie > 1,5 g/l Elle est source d’augmentation de lactate intracérébral et source de nécrose de la pénombre ischémique. On la prévient en interdisant les perfusions de sérum glucosé, que l’on remplace par une perfusion de sérum salé à 9 ‰ qui a l’avantage de faire monter la tension artérielle. Si une hyperglycémie > 1,5 g/l persiste, l’utilisation de l’insuline a démontré son bénéfice sur le pronostic vital et fonctionnel (6). Hyperthermie Elle est source d’augmentation de lactate intracérébral. On la traite par aspirine ou paracétamol. Diminution du débit cardiaque Elle est source d’extension de la zone de pénombre ischémique. Elle peut être l’indication d’une utilisation de tonicardiaques. Hypotension artérielle On considère qu’elle apparaît pour des chiffres tensionnels < 160/90 mmHg chez l’hypertendu, du moins à la phase aiguë de l’AIC. L’arrêt immédiat du traitement antihypertenseur doit être la première mesure, sauf s’il s’agit d’un bêtabloquant. Hypotension artérielle chez un hypertendu : pour atteindre des chiffres > 160/90 mmHg, il faut arrêter les traitements antihypertenseurs, perfuser des macromolécules (Plasmion®) ou des amines pressives (Dobutrex®). Souvent, cette hypotension peut être la conséquence du traitement d’une HTA > 220/110 mmHg par Adalate® ou Catapressan® à éviter. OEdème cérébral Utiliser Lasilix® ou mannitol 10 % (100 cc sur 15 min, 4 à 6 fois par jour). Il faut bannir les corticoïdes, sources de production de lactates intracérébraux. Tableau 1. Mesures générales selon le type de situation clinique. • AIT dans la semaine : - prise en charge ambulatoire; - aspirine. • AIT du jour : - hospitalisation (50 % des récidives dans les 48 heures) ; - aspirine. • AIT en salves ou révélant une AC/FA : - hospitalisation ; - héparine. • Infarctus cérébral progressif : - hospitalisation ; - héparine. • Infarctus cérébral sur AC/FA : - hospitalisation ; - héparine. • Infarctus du tronc basilaire : - hospitalisation ; - héparine ; - car risque de mort subite. • Infarctus cérébral stable, < 3 h, < 80 ans : - fibrinolyse ; - rt-PA ; - 0,9 mg/kg ; - 10 % en 5 min ; - 90 % en 60 min ; • Infarctus cérébral stable > 3 h : - UNV ; - aspirine ; - héparine de bas poids moléculaire. Déséquilibres hydro-électrolytiques Prévenir les complications Escarres : s’assurer d’un apport calorique suffisant et d’un nursing adapté. Fausses routes alimentaires : à l’aide d’une sonde nasogastrique. Phlébites surales : utiliser une héparine de bas poids moléculaire, surtout s’il y a une lourde hémiplégie et en effectuant un lever précoce, sauf s’il existe une sténose de la carotide interne (3,7,8). Quels traitements antithrombotiques ? Fibrinolyse ? L’autorisation de mise sur le marché fixe une limite d’utilisation de la fibrinolyse intraveineuse par rt-PA à 80 ans. Toutefois, un risque supérieur d’hémorragie cérébrale n’est pas démontré (1,3-5) et son utilisation est à adapter en fonction de l’âge physiologique du patient, de la sévérité de l’HTA et de l’existence d’un diabète. Des travaux récents6 ont démontré que le rt-PA est efficace et pas plus dangereux après 80 ans que avant. La fibrinolyse par rt-PA est donc possible chez le sujet âgé mais à trois conditions : respect de certaines précautions, solide expérience et réalisation dans une unité de soins intensifs neurovasculaires. Unités neurovasculaires Objectif : Accroître les chances de survie des patients AVC sans augmenter le risque de handicap. Missions des UNV : assurer une prise en charge optimale : • assurer 24 h sur 24 la prise en charge des pathologies neurovasculaires aiguës ; • effectuer un diagnostic précis et précoce : en réalisant rapidement les investigations les plus appropriées ; • assurer la surveillance de l’état neurologique et des constantes vitales ; • débuter rapidement les traitements médicamenteux et rééducatifs ; • mettre en place le projet de rééducation et de réadaptation ; • informer et réaliser l’éducation thérapeutique du patient et de l’entourage. Un constat péjoratif : • moins de 10 % des AVC, quelque soit leur âge, ont été traités en UNV en France en 2005 ; • pas de financement en France pour assurer le traitement en urgence des AVC : 7 500 décès ou dépendances qui pourraient être évités chaque année. Héparine à dose anticoagulante ? L’héparine avec le maintien d’un INR entre 1,5 et 2 reste indiquée, après 80 ans, sou Le progrès des unités neurovasculaires L’évaluation des unités neurovasculaires (1-4) a montré que les patients de plus de 80 ans bénéficiaient de ce type de prise en charge, avec une réduction de la mortalité et du taux de handicap de 20 %. Cette efficacité reposait sur l’application de 10 mesures générales qui, lorsqu’elles étaient appliquées de façon continue dans les 24 ou 48 premières heures, avaient leur pleine efficacité (tableau 2) qu’il s’agisse d’un infarctus cérébral ou d’une hémorragie cérébrale. Héparine à dose anticoagulante ? L’héparine avec le maintien d’un INR entre 1,5 et 2 reste indiquée, après 80 ans, sous les précautions d’usage, dans quelques indications - infarctus cérébral hémodynamique sur sténose très serrée de la carotide interne, donnant un tableau déficitaire neurologique fluctuant ; - salve d’AIT sur sténose serrée de la carotide ; - infarctus du tronc cérébral par atteinte athéromateuse du tronc basilaire ; - infarctus sur arythmie cardiaque par arythmie auriculaire ; - phlébite cérébrale : celle-ci est rare chez le sujet âgé, contrairement à la jeune femme. Schéma habituel : 250 mg d’aspirine + HBPM D’une façon générale, en dehors de ces indications, on propose de l’aspirine à la dose de 250 mg/j (dont l’efficacité a été démontrée sur la mortalité à 3 mois) (2) et une héparine de bas poids moléculaire pour diminuer le risque de thrombose veineuse profonde et d’embolie pulmonaire (3). Les recommandations européennes (10), reposant sur des situations cliniques habituelles et fréquentes et demandant un traitement adapté sont résumés dans le tableau 1. Tableau 2. Les 10 mesures générales (EUSI 2003). • Maintien d’une HTA médicalement contrôlée jusqu’à 220/90 mmHg • Maintien d’une glycémie < 1,5 g/l • Traitement de T° > 38° C • O2 nasal • Tronc incliné à 30 % • Prévention des troubles de la déglutition • Prévention d’infection urinaire • Prévention des escarres • Prévention des phlébites →héparine de bas poids moléculaire • Prévention de l’oedème cérébral : mannitol • Le meilleur traitement de l’AVC (gain de 20 % de mortalité et de handicap) • Le plus accessible • Quel que soit l’âge • Le plus difficile à appliquer
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