Publié le 20 déc 2010Lecture 4 min
Comment conduire un traitement antiépileptique chez la femme enceinte ?
J. M. BRIDERON, Marigot, Saint-Martin
Le gynécologue doit informer toute femme épileptique en activité génitale de la nécessité de programmer ses grossesses et d’effectuer une consultation préconceptionnelle en neurologie. Il convient de lui rappeler que toute crise d’épilepsie peut, en elle-même, avoir une incidence sur le déroulement de la grossesse et qu’il ne faut donc pas arrêter le traitement sur le seul argument d’une gestation souhaitée ou en cours.
Devant un désir de grossesse Il faut rediscuter l’indication du traitement avec passage, dans la mesure du possible, à une monothérapie tout au moins temporairement, au mieux une benzodiazépine, à doses minimales en s’aidant des dosages sanguins. En cas d’utilisation de la carbamazépine (Tégrétol®) et du valproate de sodium (Dépakine®), il sera conseillé de prendre un supplément en acide folique (2 comprimés par jour en une seule prise de Speciafoldine® 5 mg ou d’acide folique CCD 5 mg) au moins 4 semaines avant et 8 semaines après le début de la grossesse, en espérant diminuer par ce biais le risque d’anomalie de fermeture du tube neural (AFTN). L’efficacité d’une telle mesure a été, en effet, démontrée chez les femmes à risque car ayant déjà eu des enfants porteurs de ces malformations. La surveillance foetale sera adaptée au traitement utilisé. Chez une femme déjà enceinte L’adaptation posologique sera discutée en fonction des possibilités cliniques, mais habituellement le traitement en cours ne sera pas arrêté. La recherche d’un effet tératogène fera appel aux échographies obstétricales, au dosage de l’alphafoetoprotéine plasmatique maternelle et éventuellement aux dosages dans le liquide amniotique de l’acétylcholinestérase et de l’alphafoetoprotéine, deux substances augmentées en cas d’AFTN. Les échographies obstétricales orientées seront confiées à des praticiens informés de la situation, possédant une bonne formation initiale et continue, avec une activité soutenue, et travaillant sur des appareils haut de gamme, aux périodes clés, idéalement à 12, 22 et 32 semaines d’aménorrhée (SA). Ces échographies pourront détecter, dès 12 SA, l’anencéphalie et souvent plus tardivement (22 SA) les autres malformations (fente labio-maxillaire, spina bifida, etc.). Il conviendra de toujours rappeler à la patiente qu’une échographie « normale » diminue la probabilité de malformation, mais ne saurait l’exclure. Le triple test sanguin réalisé entre 14 et 18 SA pour détecter les foetus atteints de trisomie 21, comprend, entre autres, un dosage de l’alphafoetoprotéine sérique maternelle dont le taux est statistiquement augmenté en présence d’une anomalie de fermeture du tube neural. Les laboratoires d’analyse agréés pour effectuer ce test ont donc l’habitude de préciser sur leur compte-rendu s’il existe un risque augmenté d’AFTN, en sus du risque de trisomie 21. En présence d’une malformation, la patiente sera prise en charge dans un Centre pluridisciplinaire de médecine foetale. Dès le deuxième trimestre, et mieux encore au troisième Le risque malformatif étant écarté, il devient possible d’adapter de nouveau le traitement en fonction de la situation clinique et des dosages sanguins. Ceuxci sont nécessaires à l’ajustement posologique en raison de la grande variabilité des concentrations sanguines tout au long de la gestation. La dose délivrée sera la plus faible possible puisque les effets foetotoxiques, y compris au dernier trimestre, de l’acide valproïque par exemple, sont souvent corrélés aux taux plasmatiques. Le mois précédant l’accouchement sera l’occasion de supplémenter la patiente en vitamine K (une à deux ampoules buvables par jour de vitamine K1 Roche 10 mg/ml par exemple), en cas de traitement inducteur enzymatique hépatique (phénobarbital, phénytoïne), associé à 1 000/1 500 Ul/j de vitamine D2 en cas de prise de phénobarbital, réputé altérer l’équilibre phosphocalcique. Dans le post-partum Il faudra se méfier d’un surdosage lié au retour à l’état non gravidique (diminution du volume sanguin, etc.). L’allaitement maternel peut être accepté, dans la mesure où la plupart des antiépileptiques passant dans le lait maternel, cela ne peut que limiter d’éventuels syndromes de sevrage du nouveau-né, possibles avec les benzodiazépines et le phénobarbital. Une astuce consiste à donner le sein juste avant de prendre le traitement.
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