Publié le 26 nov 2024Lecture 3 min
Craniopharyngiomes : quel rôle pour le neuroradiologue ?
Suzette VINALET, Reims
La prise en charge des craniopharyngiomes (CP) est multidisciplinaire. Elle implique les ophtalmologues pour les troubles visuels, les endocrinologues pour la mise en place d’une thérapie hormonale substitutive, les neurochirurgiens, les radiologues, les radiothérapeutes, les oncologues… Mais quelles sont les principales étapes requérant l’intervention du neuroradiologue ?
Tumeurs cérébrales de grade 1, les CP se développent à partir des vestiges ectodermiques de la poche de Rathke. Leur incidence annuelle est de 0,5 à 2,5 nouveaux cas pour 106 personnes. Selon une distribution bimodale, ils touchent principalement les enfants et adolescents (5-15 ans) ou les adultes de 55 à 69 ans.
Un diagnostic complexe à établir
Lors du diagnostic différentiel, les CP sont à dissocier des germinomes, des lésions hypervasculaires (hémangioblastome, pituicytome, métastases), des astrocytomes, des tumeurs glioneuronales, ou des histiocytoses. « Pour les neuroradiologues, il ne faut pas juste faire des séquences hypophysaires en cas de CP, mais pensez au 3D T2, parfois au 3D FLAIR », précise la Pr Delphine Leclercq (hôpital Pitié-Salpêtrière, Paris) lors du congrès de la Société européenne de neuroradiologie (ESNR). En effet, le protocole d’IRM comporte des séquences 3D T1 avant et après contraste, coupe coronale T2 (glande pituitaire et lésion), 3D T2 (lésion et plancher du troisième ventricule), 3D-FLAIR, IRM de diffusion, voire de perfusion dans certains cas.
Différencier deux formes spécifiques
Selon la classification OMS de 2021, il existe deux sous-types distincts : les CP adamantinomateux (CPA) et les papillaires (CPP). Rencontrés chez l’enfant et l’adulte, les CPA sont les plus fréquents. Généralement localisés sur l’axe hypothalamo-hypophysaire, ils représentent 90 % des CP et sont surtout kystiques. Quant à la forme papillaire (10 % des CP), elle est retrouvée uniquement chez l’adulte et caractérisée par une mutation BRAF V600E dans 95 % des cas. Tumeurs solides non calcifiées, les CPP présentent de plus petits kystes. Ils se développent au niveau de l’infandibulum ou à l’intérieur du troisième ventricule. À l’imagerie(1), un étroit renfoncement en forme de canal est un signe caractéristique de CPP (figure 1).
Figure 1.
Identifier les patients à risque de syndrome hypothalamique
La prise en charge des CPA passe par une opération chirurgicale, qui présente des risques de survenue d’un syndrome hypothalamique. Celui-ci se manifeste par une obésité/hyperphagie, une somnolence, des troubles comportementaux, un diabète insipide adipeux… Le risque élevé de lésion hypothalamique est lié à l’adhésion du CP à l’hypothalamus. Avant l’intervention, « il faut détecter les patients à haut risque d’altérations hypothalamiques grâce à un IRM 3D T2 », explique la Pr Leclercq. Ainsi, les risques sont importants en cas d’hypothalamus positionné autour de la partie médiane de la tumeur, de tige pituitaire amputée et de forme tumorale elliptique(2). Il est alors recommandé de procéder à une ablation limitée et d’associer une radiothérapie (RT). Cela permet de réduire le risque d’obésité à long terme sans augmenter celui de rechute locale. La RT peut être une protonthérapie ou une RT conformationnelle 3D.
Réaliser une imagerie avant et après l’opération
Pour le neuroradiologue, l’objectif est aussi de préciser la localisation tumorale en vue de l’approche chirurgicale (figure 2), grâce à l’IRM 3D T2. Outre la tige pituitaire et les voies optiques, il est important de repérer la position relative entre la tumeur et le plancher du troisième ventricule/hypothalamus. Plusieurs classifications topographiques existent. La voie d’abord chirurgicale varie en fonction de la localisation du CPA. Ainsi, l’approche est endonasale transsphénoïdale (TS) pour les CP infra-hypothalamiques(3), et transcrânienne en cas de tumeurs supra-hypothalamiques intraventriculaires. En revanche, il n’existe pas de consensus si la localisation est cisternale ou ventriculaire, mais la voie endonasale TS est privilégiée.
Figure 2.
Après l’intervention, une imagerie postopératoire (3D T2) est réalisée. Elle peut révéler une masse postérieure résiduelle, qui sera ciblée par RT. Elle permet également de vérifier la décompression des voies optiques. Il sera pratiqué une imagerie cisternale 3D.
Quant aux CPP, leur traitement chirurgical consiste en une fenestration du kyste, avec biopsie. La stratégie thérapeutique passe ensuite par une thérapie ciblée avec inhibiteurs de BRAF/MEK, puis une protonthérapie si besoin.
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