Publié le 20 oct 2009Lecture 4 min
La toxine botulique dans la migraine chronique ?
Dr Roseline Péluchon
La toxine botulique de type A doit sa célébrité à son utilisation dans le traitement des rides. Mais bien d’autres applications en sont faites en médecine que ce soit dans le traitement des dystonies (blépharospasme, spasme hémifacial, torticolis spasmodique, troubles de l'oculomotricité …) ou dans le traitement symptomatique local de la spasticité des membres supérieurs et/ou inférieurs chez l’adulte et chez l’enfant de plus de 2 ans. L’arrivée de la toxine botulique en urologie a également représenté une véritable révolution (hyperactivité vésicale). Et, si les essais le confirment, la toxine botulique de type A pourrait aussi connaître son heure de gloire dans le traitement préventif des crises de migraine. Son utilisation dans cette indication fait l’objet de nombreux travaux, et les résultats de deux études de phase III, PREEMPT 1 et 2, viennent d’être communiqués.
PREEMPT 1 et PREEMPT 2 avaient pour but d’évaluer l’efficacité et la sécurité de la toxine botulique de type A (Botox) dans la migraine chronique. Le critère principal dans PREEMPT 1 concernait l’efficacité de la toxine botulique sur le nombre mensuel d’épisodes de céphalées alors que le critère principal de PREEMPT 2 était la réduction du nombre de jours de céphalées par mois. Les deux essais ont été menés en double aveugle contre placebo, les patients inclus (n=679 et n=705 respectivement) ont été randomisés et ont reçu soit une injection toutes les 12 semaines, de 155 à 195 U de toxine botulique A, soit un placebo, et une évaluation avait lieu à 24 semaines. Puis les essais ont été poursuivis par une phase en ouvert avec 3 cycles d’injection (semaines 24, 36 et 48). Mais la douleur n’étant le pas seul critère à évaluer dans la pathologie migraineuse, d’autres critères secondaires ont été étudiés, comme l’impact de la migraine sur la vie des patients. Les résultats de PREEMPT 1 paraissent un peu décevants en ce qui concerne le critère principal. En effet, si une diminution significative du nombre d’épisodes de céphalées est constatée, elle l’est dans les deux groupes, et aucun avantage concernant ce critère n’apparaît dans le groupe toxine botulique. Les auteurs précisent toutefois que ce résultat est sans doute biaisé par le déséquilibre initial entre les deux groupes vis-à-vis du nombre de céphalées par mois. En revanche, le critère secondaire concernant le nombre de jours de céphalées par mois est diminué de façon significativement plus importante dans le groupe toxine botulique comparativement au groupe placebo : -7,8 jours versus -6,4 jours à 6 mois (p=0,006). Tous les autres critères secondaires d’efficacité sont aussi en faveur du traitement actif. PREEMPT 2 nous offre des résultats encore plus encourageants. Les patients ayant reçu la toxine botulique rapportent en moyenne au 6e mois une diminution de 9,0 jours de céphalées par mois, contre 6,7 dans le groupe placebo (p<0,001) et tous les critère secondaires sont en faveur de la toxine botulique. Une analyse en sous-groupe a été faite, les 2 essais poolés, concernant uniquement les patients sur-consommateurs de médicaments de la crise. Il en ressort que ces patients ont une réduction significative du nombre d’épisodes de céphalées, du nombre de jours avec céphalées et de l’intensité des crises. La qualité de vie a été évaluée par le Headache Impact TestTM ( HIT-6), et là encore, les 2 essais ont été poolés. Une différence statistiquement significative est observée entre les 2 groupes, reflétant d’importantes améliorations de la qualité de vie et une réduction du retentissement psychologique de la migraine. Bien que les effets secondaires soient relativement fréquents (mais aussi dans le groupe placebo), des évènements sérieux n’ont été que rarement signalés (3,9 % dans PREEMPT 1, 3,5 % dans PREEMPT 2) et les auteurs estiment que le traitement comprenant 1 série de 5 injections, à raison de 1 toutes les 12 semaines est sûre et bien tolérée. Si ces résultats se confirment, la toxine botulique pourrait ainsi bien trouver dans la prévention de la migraine chronique un nouveau champ d’action.
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