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Sclérose en plaques

Publié le 09 jan 2011Lecture 11 min

Sémiologie IRM de la SEP

A. TOURBAH, Service de Neurologie et Faculté de Médecine, CHU de Reims
L’IRM est aujourd’hui un examen incontournable dans la prise en charge de la sclérose en plaques (SEP). L’analyse sémiologique des lésions, taille, nombre, aspect, topographie, et leur évolution dans le temps sont en effet capitales. Le comportement lésionnel sur les différentes séquences est également important, ce qui suppose quelques connaissances de la technique nécessaire lors de l’exploration en IRM d’un patient suspect ou atteint de SEP.
La technique d’acquisition doit être rigoureuse, reproductible, adaptée à la physiopathologie de la SEP, et permettre l’examen de l’ensemble du système nerveux central (SNC). Les différents examens de suivi permettront une lecture comparative, chez le même patient, de deux IRM pratiquées à des moments différents. Les principales recommandations pour la pratique de l’IRM dans la SEP figurent dans le tableau. Séquences et anomalies Les différents contrastes obtenus en IRM sont liés à des différences de signaux qui dépendent du contenu tissulaire et du type de paramètres utilisés. Deux types de paramètres sont utiles en clinique : la pondération T1 et la pondération T2. La combinaison des séquences permet d’identifier les lésions à des stades différents de leur évolution. Les séquences pondérées en T2 identifient les lésions comme des zones d’hypersignal contrastant avec le bas signal de la substance blanche (figure 1 AC, E-G, I-M). La séquence dite pondérée en densité de protons permet d’améliorer la visualisation des lésions proches des cavités ventriculaires. Ainsi, ces deux séquences pondérées en T2 sont obtenues en spin-écho au cours d’une même acquisition fournissant des informations complémentaires. La séquence FLAIR pondérée en T2 supprime le signal du LCR, et permet une meilleure détection des lésions périventriculaires et juxta-corticales (figure 1 B-C et EF). Toutefois, les séquences FLAIR sont moins efficaces que les séquences spin-écho pour la détection des lésions infratentorielles et médullaires. Les séquences FLAIR sont moins efficaces que les séquences spin-écho pour la détection des lésions infratentorielles et médullaires. Certaines lésions sont visibles sous la forme d’hyposignaux sur les séquences pondérées en T1. Figure 1. A. IRM cérébrale, plan sagittal, séquence spin-écho en densité protonique. Anomalies de signal visibles sur les séquences pondérées en T2 touchant le bord inférieur du corps calleux ; B. IRM cérébrale, coupe axiale, séquence FLAIR pondérée T2. Anomalies de signal touchant les régions périventriculaires et sous-corticales ; C. IRM cérébrale, séquence FLAIR pondérée T2. Anomalie du signal touchant les régions périventriculaires et sous-corticales. C’est le cas de 50 % des lésions aiguës, appelées par certains trous noirs aigus. Ils sont liés à l’oedème et la démyélinisation. Ils sont réversibles dans 50 % des cas. Les lésions persistantes sur deux examens successifs sont appelées trous noirs chroniques ou persistants (figure 1 D). Ils témoignent, eux, de la perte axonale. L’injection de gadolinium peut révéler les lésions récentes sur les séquences pondérées en T1 (figure 1 K), en rapport avec l’augmentation de la perméabilité de la barrière hémato-encéphalique (BHE). Elles sont dites actives. Cet aspect dure en moyenne 4 à 6 semaines, moins de 3 mois dans 95 % des cas. Leur aspect est annulaire ou homogène.Les prises de contraste annulaires correspondraient plutôt à une réactivation de lésions anciennes, alors que l’aspect homogène traduirait l’apparition de nouvelles lésions. La sémiologie radiologique Certaines caractéristiques sémiologiques des lésions en IRM orientent vers le diagnostic de la SEP. Des lésions de moins de 3 mm de diamètre peuvent correspondre à des lésions démyélinisantes, notamment en topographie corticale. Toutefois, la taille minimale des lésions retenue est de 3 mm, ce qui évite de prendre en considération des lésions dites non spécifiques. Tous les aspects lésionnels peuvent être observés dans la SEP. Certains sont néanmoins très évocateurs. C’est le cas des lésions ovalaires ou elliptiques (figure 1 B et C), perpendiculaires à la paroi ventriculaire, et qui correspondent en neuropathologie aux doigts de Dawson, en rapport avec l’orientation des veinules, qui sont le siège de l’augmentation de la perméabilité de la BHE. Figure 1. D. IRM cérébrale, spin-écho pondérée en T1 après injection de gadolinium. Persistence de lésions d’hypersignaux (trous noirs) ; E. IRM cérébrale, séquence FLAIR pondérée T2. Lésion juxta-corticale en fer à cheval ; F. IRM cérébrale séquence FLAIR pondérée T2. Signe du chapeau de la corne temporale. C’est le cas aussi des lésions à deux composantes de signal, l’une centrale très hyperintense, l’autre périphérique moins intense correspondant à l’oedème lésionnel. Ces deux composantes sont séparées par un anneau en relatif hyposignal (figure 1 G). Ce type de lésion est en général actif. Ainsi, il apparaîtra après injection de gadolinium un rehaussement du signal sous la forme d’un anneau, complet ou non (figure 1 K), siégeant à la frontière entre les deux composantes de signal visibles sur les séquences pondérées en T2. Certaines lésions volumineuses, de diamètre supérieur à 2 cm, sont appelées lésions démyélinisantes extensives. Typiquement, l’effet de masse est minime ou absent. Elles peuvent être nodulaires, classiques ou non, « baloïdes » (ressemblant à celles de la sclérose concentrique de Balo, prenant un aspect de cercles concentriques de signal différent), infiltrantes, voire pseudoleucodystrophiques. Leur pronostic semble dépendre de la réduction du volume lésionnel observé sur une IRM de contrôle réalisée un mois après la première. Les topographies, la répartition et les localisations des lésions sont des éléments importants à considérer. Typiquement, les lésions touchent la substance blanche de manière bilatérale et asymétrique. Toutefois, l’atteinte de la substance grise (cortex et noyaux gris centraux) est possible, même en début de maladie. Au cours de l’évolution, les lésions ont tendance à la confluence, alors que se développe une atrophie souscorticale et corticale qui devient visible macroscopiquement. Les topographies, répartition et localisations des lésions sont des éléments importants à considérer. À l’étage supratentoriel, les lésions sont fréquemment périventriculaires et sous-corticales (figure 1 B et C). L’atteinte du corps calleux est fréquente, notamment de son bord inférieur (figure 1 A). Figure 1. G. IRM cérébrale, séquence spin-écho en densité protonique. Lésion à double composante de signal : l’une centrale intense, l’autre périphérique moins intense. H. IRM cérébrale, même plan de coupe que H qui, en spin-écho en T1 après injection de gadolinium, met en évidence un rehaussement annulaire. Une atteinte périventriculaire caractéristique correspond au signe du « chapeau de la corne temporale » (figure 1 F) : ces lésions coiffent la corne temporale. Les lésions juxtacorticales sont elles aussi fréquentes : ainsi, 90 % des patients auraient au moins une lésion corticale ou juxtacorticale, bien mise en évidence par les séquences FLAIR. Leur aspect en « fer à cheval » est évocateur (figure 1 E). Les lésions corticales sont plus difficiles à voir avec les séquences classiques. De nouvelles séquences utilisant une double inversion récupération (séquences DIR) sont actuellement développées pour les visualiser (figure 1 I). À l’étage sous-tentoriel, ces anomalies de signal touchent notamment le plancher du quatrième ventricule, les pédoncules cérébelleux, la protubérance et la substance blanche cérébelleuse (figure 1 J). Lésions médullaires Les lésions médullaires touchent moins de deux segments médullaires et moins de la moitié de la surface axiale de la moelle. Elles peuvent s’accompagner d’un gonflement de la moelle ou, à l’inverse, d’une atrophie segmentaire (figure 1 L). Les séquences STIR, complémentaires des séquences d’écho de spin pondérées en T2 permettent de mieux les préciser (figure 1 M). Ces lésions sont visibles sous la forme d’un hypersignal sur les séquences pondérées en T2, alignées le long de l’axe médullaire. Elles ont plus de spécificité que les lésions cérébrales, et peuvent déborder le segment médullaire, ou même toucher la substance grise. La localisation cervicale est la plus fréquente, et les trous noirs sont moins habituels que dans le cerveau. Figure 1. I. IRM cérébrale : lésions corticales en séquence DIR ; J. IRM cérébrale, coupe axiale, séquence spin-écho en densité protonique. Anomalies du signal touchant les structures de la fosse postérieure. Parfois, des lésions plus diffuses sont visibles, décrites sous l’aspect de substance blanche « sale » chez les patients atteints de formes progressives de l’affection. Les lésions médullaires peuvent s’accompagner d’un gonflement de la moelle ou, à l’inverse, d’une atrophie segmentaire. Neuropathie optique Devant une neuropathie optique, l’IRM met en évidence des anomalies des nerfs optiques dans plus de 90 % des cas. Au début, il s’agit d’un rehaussement du signal après injection de gadolinium, et d’un élargissement des espaces périoptiques, associé à une augmentation du signal en T2, et d’une anomalie de signal intra-optique pouvant toucher les segments intra-orbitaire, intracanalaire ou intracisternal du nerf optique (figure 1 K). Figure 1. K. IRM cérébrale, coupe coronale centrée sur les nerfs optiques, séquence STIR. Anomalie du signal touchant le nerf optique gauche dans la portion intracisternale.  Par la suite, le calibre du paquet optico-péri-optique diminue, associé ou non à la persistance d’une anomalie de signal. Devant une neuropathie optique, l’IRM met en évidence des anomalies des nerfs optiques dans plus de 90 % des cas. Les lésions de la SEP sont typiquement bilatérales mais asymétriques. Elles sont d’intensité variable sur les différentes séquences. Des lésions symétriques d’intensité homogène doivent faire reconsidérer le diagnostic. Les autres éléments importants pour le diagnostic différentiel sont les suivants : - absence de lésions périventriculaires ; - prise de contraste méningée ; - lésions intramédullaires étendues sur plus de trois étages vertébraux ou occupant plus de la moitié de la surface axiale de la moelle. Les principaux diagnostics différentiels en IRM sont la leucoencéphalopathie non spécifique dite vasculo-dégénérative et l’encéphalomyélite aiguë disséminée (EMAD). Dans le premier cas, il n’y a pas d’atteinte juxtacorticale, sous-tentorielle ou médullaire. Dans le second cas, le contexte et l’évolution cliniques, associés aux résultats de l’analyse du LCR, sont déterminants. IRM et pronostic de la SEP En début de maladie, l’IRM peut être normale (30 % des cas, syndrome clinique isolé) ou montrer des lésions qui remplissent ou non les critères de Barkhof/Tintoré, retenus parmi les critères de dissémination spatiale. Ces lésions sont cérébrales dans 30 % des cas, médullaires et cérébrales dans 40 % des cas, actives chez 30 % des patients Figure 1. L. IRM médullaire, plan sagittal, séquence spin-écho pondérée T2. Anomalie du signal de la moelle thoracique avec atrophie segmentaire.  En l’absence d’anomalies sur l’IRM initiale, le risque d’un deuxième épisode clinique est de 20 % après 20 ans d’évolution, alors qu’il est de plus de 80 % si l’IRM initiale montre au moins une lésion. Le risque de handicap clinique après 5, 10, et 15 ans d’évolution augmente lui aussi avec le nombre de lésions initiales. Il en est de même en cas d’accumulation des lésions les 5 premières années après l’épisode initial. Figure 1. M. IRMmédullaire, plan sagittal, séquence STIR. Lésions d’hypersignal alignées le long de l’axe médullaire.  En l’absence d’anomalies sur l’IRM initiale, le risque d’un deuxième épisode clinique est de 20 % après 20 ans d’évolution, alors qu’il est de plus de 80 % si l’IRM initiale montre au moins une lésion. La valeur pronostique de la présence de lésions actives initiales et de leur aspect reste discutée. Il semble que la persistance de lésions actives sur des examens sériés soit prédictive de la survenue de poussées. En pratique  Devant une leuco-encéphalopathie, une bonne analyse sémiologique des lésions observées en IRM permet une orientation diagnostique et pronostique adaptée.  Certaines caractéristiques lésionnelles, notamment en termes d’aspect et de topographie, sont très suggestives du diagnostic de la SEP.

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