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Neurologie générale

Publié le 29 oct 2020Lecture 6 min

Les ventriculomégalies cérébrales

Jean-Philippe BAULT, CHU Bicêtre CPDP, CHI Poissy Saint-Germain Cabinet d’échographies gynéco-obstétricales, Les Mureaux

La découverte d’une ventriculomégalie (VM) est un motif fréquent de recours à un avis de seconde intention auprès d’un CPDPN. En effet, l’aspect des ventricules latéraux est l’un des items cérébraux retenus, dans les recommandations du CNTEDP et plus récemment de la CNEOF, pour la réalisation de l’examen morphologique de dépistage du fœtus au deuxième trimestre. Il est à noter que, paradoxalement, cet item n’a par contre pas été retenu lors de l’examen du troisième trimestre…

Aucune iconographie n’est requise au décours de l’examen de dépistage. Toutefois, les recommandations pour l’examen de diagnostic mentionnent de faire figurer dans le compte rendu une coupe axiale mettant en évidence la mesure du diamètre atrial distal, et une coupe coronale illustrant les cornes frontales des ventricules latéraux. Soulignons que l’ISUOG est plus exigeante, puisqu’il est recommandé dans les « Guidelines » pour le dépistage de réaliser au moins 5 plans de coupe, afin d’étudier les ventricules latéraux(1). Nous avons détaillé dans un article précédent (Les repères de l’examen du cerveau lors de l’examen morphologique. Gynécologie Obstétique Pratique  318) : – la façon de mesurer le diamètre atrial (figure 1)(2). Il faut souligner que seule la corne postérieure du ventricule latéral distal est mesurable dans le plan axial, l’atténuation par les structures osseuses du crâne ne permettant pas une mesure du ventricule proximal. Il est donc très important d’être attentif à l’aspect des cornes frontales, tant sur un plan axial (figure 2a), que sur un plan coronal (figure 2b), et ceci afin de ne pas méconnaître une VM unilatérale proximale. Figure 1. Mesure du diamètre atrial. Figure 2. Cornes frontales (flèches). A : coupe axiale ; B : coupe frontale. La valeur retenue pour définir une VM est une mesure du diamètre atrial supérieure à 10 mm(3), ce qui représente le 99e percentile. Cette valeur apparait comme constante de 18 à 36 SA(4). Les variations de la taille des ventricules en fonction du sexe ne sont pas suffisamment significatives pour avoir une implication clinique. Une mesure du diamètre atrial de 10 à 12 mm définit une VM modérée, de 12 à 15 mm une VM moyenne, et une valeur supérieure à 15 mm une VM sévère. – l’anatomie du système ventriculaire cérébral foetal, permettant de comprendre le mécanisme des différents types de VM : ainsi, une obstruction d’un trou de Monroe sera responsable d’une VM unilatérale, un obstacle au niveau de l’aqueduc de Sylvius entraînant une VM triventriculaire. Étiologies Les anomalies chromosomiques sont fréquemment associées à des VM ; il apparaît impossible de détailler ici l’ensemble des aberrations pouvant être retrouvées. Caryotype et ACPA seront donc les élément s majeurs du bilan. Les pathologies cérébrales – Les malformations du tube neural : la VM plus ou moins importante (figures 3 a et b) est souvent le signe d’appel d’un spina-bifida aperta . Elle amènera à rechercher d’autres signes indirects : anomalie de Chiari (figure 3 c), déformation de la boîte crânienne (signe du « citron ») (figure 3 d), et bien sûr des signes directs au niveau du rachis (figure 4). Il est important de rappeler que 10 % des spina-bifida ne présentent pas de signes indirects, donc pas de VM. Figure 3. A et B : VM ; C : anomalie de Chiari ; D : déformation du crâne : « signe du citron ». Figure 4. Spina-bifida aperta. A : coupe sagittale ; B : coupe axiale. – Les dysgénésies calleuses : l’agénésie du corps calleux (ACC) s’accompagne dans la majorité des cas d’une VM d’un type assez particulier : la colpocéphalie réalisant un aspect en « goutte de larme » au niveau de la corne postérieure du ventricule. – Le syndrome L1 : cette anomalie sévère est liée à l’X. Elle est en rapport avec une mutation du gène L1CAM (plus de 240 mutations de ce gène ont été décrites). Elle est responsable dans la majorité des cas d’une VM triventriculaire (figure 5 a), souvent majeure par sténose de l’aqueduc de Sylvius (cette entité était autrefois dénommée hydrocéphalie par sténose de l’aqueduc de Sylvius : HSAS). Une anomalie des pouces à type de pouces adductus est retrouvée dans 50 % des cas chez ces fœtus de sexe masculin (figure 5 b)(5). Figure 5. Syndrome L1. A : VM triventriculaire 17 SA ; B : pouce adductus. – Les ciliopathies à expression cérébrale : - syndrome de Joubert : pour lequel il faudra rechercher l’allongement des pédicules cérébelleux supérieurs (signe de la « dent molaire ») (figure 6)(6). - syndrome de Meckel-Gruber : associant encéphalocèle postérieure, anomalies rénales et hexadactylie (figure 7). Figure 6. Syndrome de Joubert triplan. Pointillés : signe de la « dent molaire ». Figure 7. Syndrome de Meckel-Gruber 14 SA. A : méningocèle ; B : dysplasie rénale ; C : hexadactylie. – Les anomalies de la gyration : essentiellement les lissencéphalies de type II comme le syndrome de Walker-Warburg, associant à la VM le plus souvent majeure une dysplasie rétinienne, un tronc cérébral en forme de « Z » (figure 8). Figure 8. Lissencéphalie type II. A : VM sévère ; B : tronc cérébral en « Z » ; C : dysplasie rétinienne. – Les hémorragies cérébrales : leur grade peut être variable de 1 à 4. Cette étiologie sera soupçonnée devant un aspect hyperéchogène des parois ventriculaires et la présence de formations échogènes à contours irréguliers au sein du ventricule correspondant à des caillots (figure 9). Ces lésions hémorragiques peuvent se compliquer d’ischémie altérant les parois ventriculaires (figure 10). Figure 9. VM hémorragique. Flèche jaune : caillot. Figure 10. Ischémie : lésions clastiques périventriculaires. De nombreuses autres anomalies cérébrales peuvent s’accompagner de VM : anomalie de Dandy-Walker, rhombencéphalosynapsis, hémimégalencéphalie, kyste arachnoïdien compressif, processus expansifs… Les infections – Cytomégalovirus : les VM sont un des signes d’appel pouvant faire suspecter une infection à CMV. Ces VM pouvant s’accompagner de synéchies intraventriculaires, d’un halo échogène péri-ventriculaire survenant dans un contexte de microencéphalie et de troubles de la gyration (figure 11). – Toxoplasmose : les VM sont volontiers très évolutives dans ce type d’infection ; il faudra rechercher des atteintes du cortex cérébral se manifestant par des zones hyperéchogènes en « tache de bougie » (figure 12). Figure 11. CMV. A : halo hypoéchogène périventriculaire ; B : microencéphalie et micropolygyrie. Figure 12. Toxoplasmose. A : VM ; B : lésions parenchymateuses en « taches de bougie ». Néanmoins 90 % des VM modérées sont idiopathiques, ce qui ne pourra bien sûr être affirmé qu’après un bilan complet. Bilan à réaliser Ce bilan comprendra trois volets(7,8). • Échographie morphologique détaillée : cérébrale et extracérébrale, mobilité et biométrie foetales, évaluation de la quantité du liquide amniotique. • Bilan maternel : – sérologies CMV, toxoplasmose, rubéole, herpès… – bilan d’hémostase ; – recherche d’incompatibilté plaquettaire. • Bilan fœtal : – Caryotype et ACPA – PCR CMV sur liquide amniotique ; – IRM, qui ne sera , pour certaines équipes, réalisée que si la VM est supérieure à 12 mm ; – PSF : pour NFS et hémostase si signes hémorragiques avec une attention toute particulière à l’évaluation bénéfices/risques de ce geste invasif ; – consultation génétique si VM non isolée. Une surveillance de la taille des ventricules sera effectuée toutes les deux à quatre semaines. Sont de mauvais pronostics : – une VM associée ; – une accélération de la croissance du périmètre crânien et un PC supérieur au 95e percentile ; – une microcéphalie traduisant une microencéphalie, témoin d’une atrophie cérébrale, comme observée dans les fœtopathies à CMV ; – une mesure de ventricule supérieure à 15 mm. Néanmoins, il faut savoir qu’il est difficile d’établir un pronostic précis compte tenu de la disparité des séries publiées. Publié dans Gynécologie Pratique Pour en savoir plus • Bault JP, Loeuillet L. Le cerveau foetal normal et pathologique. Sauramps Médical 2012. • Bault JP, Levaillant JM. Échographie Obstétrical - Dépistage et diagnostic. Tome 2 : Morphologie normale du foetus et de ses annexes. Sauramps éditeurs.

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