Publié le 18 fév 2009Lecture 4 min
Les dysplasies corticales sous le microscope
Dr Stéphane Auvin
La traditionnelle conférence « Merritt-Putnam » portait cette année sur les dysplasies corticales dont les différents aspects ont été abordés. Voici tout d’abord les résultats de la recherche fondamentale.
Les dysplasies corticales sont des anomalies du développement cérébral qui sont en cause dans certaines épilepsies focales non idiopathiques. La proportion exacte des dysplasies parmi les épilepsies focales reste discutée. Globalement, les dysplasies corticales expliqueraient 3 % des épilepsies et 20 % des épilepsies pharmacorésistantes. Par ailleurs, 50 à 80 % des enfants candidats à une chirurgie de l’épilepsie auraient une dysplasie corticale. La classification histopathologique des dysplasies corticales les sépare en type I (modéré) et en type II (sévère). Dans le type I, il y a une désorganisation des couches corticales sans neurones dysmorphiques. Dans le type IA, il s’agit d’une désorganisation corticale sans neurones anormaux alors que dans le type IB on peut observer des neurones immatures et/ou hypertrophiques (Tableau 1). Le type II représente un groupe de dysplasies avec une désorganisation corticale et une délamination avec des neurones cytomégaliques dans le type IIA et des « balloon cells » dans le type IIB. Le Dr Michael Duchowny du Miami Children’s Hospital a présenté les données cliniques et fondamentales qui montrent en quoi ces dysplasies corticales sont impliquées dans la genèse de crises épileptiques. Les données issues d’enregistrements EEG intra-crânien préchirurgical montrent que le système hyperexcitable est parfois plus étendu que la zone anatomique de la dysplasie. De même, l’utilisation de l’IRM fonctionnelle couplée ou non à un enregistrement EEG montre que le réseau « épileptogène » est plus étendu que la lésion. D’où la nécessité d’une évaluation préchirurgicale rigoureuse. Le Dr Gabriella D’Arcangelo de l’université du New Jersey s’est attachée à décrire les modifications cellulaires à l’origine de l’hyperexcitabilité des tissus dysplasiques. Les enregistrements électrophysiologiques au niveau cellulaire montrent que les cellules au sein de la dysplasie sont spontanément hyperexcitables. Au niveau moléculaire, il existe des modifications des sous-unités des récepteurs de la voie glutamatergique (récepteur NMDA et récepteur métabotropique). Une baisse de l’expression des transporteurs du GABA peut également être observé. Enfin, la voie des messagers intra-cellulaires (mTOR) impliqués dans la synthèse protéique pourrait être modifiée. L’ensemble de ces données peut paraître éloignée de nos pratiques cliniques. Toutefois, les applications sont potentiellement multiples. La caractérisation des propriétés moléculaires exactes des dysplasies corticales permettra aux chercheurs de valider leurs modèles animaux. De plus, ces données ont permis de faire un premier pas vers une application clinique. La rapamycine agit sur la voie mTOR et les premières données obtenues à partir de modèles de sclérose tubéreuse de Bourneville semblent intéressantes avec une régression des tubers corticaux sous rapamycine… En sera-t-il de même avec les dysplasies corticales ? Y aura-t-il une limitation pour une utilisation chez l’homme ? Tableau 1 : caractéristiques anatomopathologiques permettant de classer les dysplasies corticales Type de dysplasie corticale Caractéristiques Sous-Type Eléments caractéristiques Type 1 Forme modérée Désorganisation des couches corticales SANS neurones dysmorphiques IA Désorganisation corticale PAS de neurones anormaux Type 1 Forme modérée Désorganisation des couches corticales SANS neurones dysmorphiques IB Désorganisation corticale ET présence de neurones immatures et/ou hypertrophiques Type 2 Forme sévère Désorganisation des couches corticales ET présence de neurones dysmorphiques IIA Désorganisation corticale ET neurones cytomégaliques Type 2 Forme sévère Désorganisation des couches corticales ET présence de neurones dysmorphiques IIB Désorganisation corticale ET balloon cells
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